L'étude Euromosaic
Autres langues à Chypre
- L'arménien
- L'arabe chypriote
- Romani
1. L'arménien
L’arménien [Hayeren] est une langue de la famille indo-européenne, mais son
lien aux autres variétés indo-européennes est encore disputé. L’alphabet
arménien fut créé pour des raisons religieuses et culturelles, puisque le
christianisme était déjà devenu la religion d’état des Arméniens au 4ième
siècle. L’arménien a plus de 60 variétés. L’arménien oriental est la langue
d’état de la République d’Arménie [Hayastani Hanrapetut’yun], et l’arménien
littéraire y est utilisé dans l’éducation. Les dialectes occidentaux prédominent
dans les communautés de la diaspora, y compris celle de Chypre.
Aujourd’hui il y a environ 2 600 Arméniens à Chypre, y compris plusieurs qui
ne sont pas des citoyens chypriotes. Les Arméniens s'installèrent à Chypre pour
la première fois au 6ième siècle, gardant leurs liens avec la Syrie- surtout
avec son centre intellectuel à Edessa- jusqu’à l’arrivée des Arabes dans cette
région au 7ième siècle. La migration principale vers le Chypre suivit le
génocide arménien de 1915 à 1923 en Turquie. Les Arméniens habitent
traditionnellement dans les villes de Larnaca, Limassol et Nicosie ; ceux qui
habitaient à Famagusta s'en allèrent après l'invasion turque en 1974. Les
Arméniens ont apparemment perdu certains biens immobiliers dans le nord de
l’île, notamment les monastères de Makaravank et Kantsvor. D'après la
constitution, les Arméniens forment un groupe religieux dans la République de
Chypre, qui ont opté d’adhérer à la communauté grecque ; ils ont le droit
d’élire un représentant au parlement chypriote. Outre la cause de
non-discrimination (article 6 de la Constitution), la Constitution garantit aux
Arméniens le droit d’utiliser leur propre langue dans le privé et en public, et
de recevoir de l'instruction dans cette langue. Tous les Arméniens sont
bilingues grec-arménien.
Actuellement il y a trois églises et écoles primaires arméniennes à Chypre (Larnaca,
Limassol et Nicosie) et une école secondaire à Nicosie. L’Institut Éducatif
Melkonian est l’institut mixte le plus réputé des Arméniens chypriotes. Fondé en
1926, l’Institut Melkonian est ouvert aux étudiants des toutes nationalités, et
offre un programme scolaire secondaire complet. Toutes les matières, sauf la
langue arménienne, sont enseignées en anglais. Les langues étrangères proposées
actuellement sont le grec, le français, l'arabe, le russe et le bulgare.
Toutefois, le Conseil de l’Institut vient d’annoncer sa décision de fermer
l’école en 2005. Une émission quotidienne sur la Fondation Chypriote de
Radiodiffusion-Télévision en arménien comprend des interviews, des reportages
sur l’actualité et sur la culture et de la musique. Le deux principaux journaux
arméniens, Artsankank (fondé en 1995) et Paros (fondé en 1997), proposent
l’actualité nationale et internationale, essentiellement en arménien, mais
certaines rubriques et critiques culturelles sont imprimées en grec et en
anglais. L’église arménienne de Chypre fait paraître son propre bulletin mensuel
Keghart en arménien. La communauté arménienne de Chypre reçoit des subventions
de l’état pour des concerts, des représentations de danse, des expositions d’art
et de photographie et des événements littéraires. Parmi les organisations on
peut citer l’Union Bénévole Générale Arménienne et le Comité National Arménien.
La Société d’Amitié Chypriote-Arménienne (établie en 1998) organise des
concerts, des conférences et des expositions, afin d'établir des liens plus
proches entre les deux Républiques. Les églises arméniennes ont attribué des
espaces spécifiques à l’intérieur de leurs locaux afin d’encourager des
événements culturels tels que l’Exposition Littéraire l'Automne qui a lieu
chaque année.
Le centre de recherches arménien du moyen/proche orient (fondé en 1996 par
Vartan Malian) héberge une bibliothèque de référence et des archives de
documentation dans ses locaux à Nicosie.
Quand la République de Chypre a gagné son indépendance en 1991, de nouvelles
relations ont été établies avec la République de Chypre. Depuis 1994, des
délégations parlementaires vers et à partir de l'Arménie ont conduit à la
signature d'accords bilatéraux et à l'établissement d'un forum pour plus de
discussions et de coopération entre les deux gouvernements. En 1995,
l’ambassadeur arménien en Grèce est aussi devenu l’ambassadeur à Chypre.
L’arménien a été explicitement déclaré comme langue non-territoriale selon les
termes de la Charte Européenne pour les Langues Régionales ou Minoritaires (CELRM).
2. L'arabe chypriote
L’arabe chypriote, ou l’arabe Kormakiti [Kormakiti Arabiyya] puisque on lui a
donné le nom de l’endroit où il est encore parlé, appartient à la famille des
langues sémitiques. Cette langue est traditionnellement utilisée par la
communauté maronite, mais les croyants locaux parlent le grec et la liturgie est
lue en grec. Comme la plupart des langues vernaculaires arabes, l’arabe
chypriote n’est pas écrit, et étant donné son développement isolé, il est
pratiquement incompréhensible pour les locuteurs de l'arabe standard. La langue
a des liens avec les dialectes syriens et mésopotamiens de l'arabe, et peut-être
même avec les dialectes médiévaux de Bagdad. Une enquête menée parmi les
Maronites vers la fin des années 60 a révélé qu'aucune des personnes interrogées
n’était capable de lire ou écrire l’arabe standard.
A la fin de 1996 les Maronites étaient environ 4 500. Des colonies de
Maronites d’origine syrienne et libanaise sont installées à Chypre depuis le
8ième siècle. Les Maronites, qui étaient à l’origine des membres de l’Église
Orthodoxe Syrienne, sont maintenant des chrétiens de l’Église Uniate, c.- à- d.
en communion formelle avec Rome mais gardant une langue et liturgie séparées.
Cette relation fut renforcée avec les croisades, surtout après 1182, quand ils
ont cherché l’union avec le patriarche d'Antioche au Liban. Plusieurs Maronites
arrivèrent à Chypre quand les États latins du Levant sont tombés sous l'Islam,
et cette émigration continua sous les Vénitiens jusqu’à la conquête de l'île par
les Ottomans (1570-71). En dépit de l’interdiction du catholicisme, les
Maronites ont survécu comme une communauté séparée. A la fin du 15ième siècle,
il y avait environ 1 500 Maronites distribués dans 19 villages; en 1881 leur
nombre était diminué à 830 personnes, dispersés dans les villages de Kormakiti/Koruçam,
Agia Marina/Gürpinar, Asomatos/Özhan et Karpasha/Karpaşa au nord-ouest de l'île,
ou il y avait aussi plusieurs monastères et églises. Bien que le nombre de
Maronites ait augmenté à plus de 4000 depuis cette époque, leur modèle de
distribution fut perturbé: la plupart des Maronites se sont réinstallés dans le
territoire contrôlé par la République de Chypre, mais dispersés à Nicosie et
dans les villages aux alentours. Seulement quelques membres de la communauté
(165 d’après les estimations de l’ONU en 2001) sont restés dans les villages
traditionnels dans la région occupée par la Turquie. Il y a encore des contacts
entre les Maronites du Liban et ceux de Chypre, mais moins fréquemment
qu'auparavant.
L’arabe chypriote est maintenant parlé presque exclusivement par moins de
1000 membres de la communauté maronite, qui viennent tous du village de
Kormakiti. Le reste (et donc la majorité) de la communauté ne parle que le grec,
et l'usage de l'arabe est limité à des fins familiales et religieuses. La
liturgie maronite est généralement dirigée en grec plutôt qu’en arabe syriaque
ou chypriote mais la messe comprend des hymnes anciens chantés en syriaque. A
l’époque de l’invasion turque, les Maronites de Kormakiti étaient bilingues en
arabe et en grec. Il n’y a pas de cadre officiel ou éducatif pour la langue. Le
nombre extrêmement réduit d’habitants vieillissants dans les villages
traditionnels, la dispersion des Maronites qui se sont réinstallés et le degré
d'endogamie plus bas qui en résulte ont contribué à un procès d'assimilation
linguistique.
Les Maronites de Chypre ont leur propre évêque mais sont sujets au Patriarche
d'Antioche, qui est nommé par le pape ; ils ont opté d’adhérer à la communauté
grecque selon la Constitution de 1960. La clause de non-discrimination (article
6) de la République de Chypre s'applique à l'arabe chypriote ainsi qu'à
l'arménien et au turc. Dans la République de Chypre, les leaders de la
communauté Maronite demandent leurs propres écoles et logements ou villages
depuis longtemps. La construction d’une école primaire était prévue pour 2002.
3. Romani
Le romani [Romanes] est une langue indo-aryenne comme le sanskrit, le hindi
et le bengali, qui appartient à la branche indo-iranienne de la famille
indo-européenne. La dispersion et la différenciation des Roms depuis leur
arrivée en Europe (12ième siècle) ont provoqué une fragmentation de la langue en
groupes distincts, qui comprennent un total d’environ 60 dialectes et variétés.
Il n’y a pas de documentation officielle concernant l’arrivée des Roms à Chypre,
mais ils arrivèrent probablement des colonies des Croisades sur les côtes
orientales de la Méditerranée (aujourd’hui le Liban et Israël) au 14ième siècle.
Ils sont environ 500 à 1000 personnes à Chypre, et ils sont classés en dehors
des groupes religieux. La plupart d’entre eux habitent dans la RTNC (République
turque de Chypre du Nord). Il n’y a pas de statistiques disponibles concernant
leur usage de langues.
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