SUR ARISTOTE, POETIQUE, Ch. 18
Aristote, Poétique, ch. 18 (p. 1356 a Bekker), texte du Parisinus : όσοι πέρσιν 'Ιλίου δ'λην εποίησαν και μή κατά μέρος ώσπερ Ευριπίδης Νιόβην και μή ώσπερ Αισχύλος, ήν Ικπίπτουσιν η κακώς αγωνίζονται.
Ce passage, évidemment corrompu, a fait l'objet de nombreuses tentatives de restitution. Quelques manuscrits de second ordre insèrent ήν Μη'δειαν après Νιόβην; Vahlen, approuvé par Christ, se contente d'écrire Ευριπίδης, [ήν] Νιόβην; on a encore proposé de corriger Ευριπίδης en Σο^ο-κίης (Hermann), OU Νιόβην en ή θηβαΐδα (Schmidt, Nauck). Aucune de ces corrections ne me paraît satisfaisante; les unes ne donnent pas un sens acceptable, les autres attribuent à Aristote une construction bien forcée.
Il y a longtemps, à mon avis, que le véritable remède a été aperçu par Georges Valla, l'auteur de la traduction latine de la Poétique au xve siècle, et plus tard par Tyrwhitt dans son édition d'Oxford (1794). Il consiste à écrire Έκάβην au lieu de Νιόβην, cor rection facile à justifier au point de vue paléographique. Si cette conjecture n'a pas rencontré l'accueil qu'elle méritait, c'est qu'en effet elle n'est pas suffisante (1). Il faut encore mettre entre crochets les mots parasites et inexplicables και μή ώσπερ Αισχύλος. Ces mots doivent, selon moi, leur origine à une glose marginale : un premier copiste avait écrit par erreur Νιόβην pour Έκάβην ; un reviseur demi-savant, sachant qu'il n'existait pas de Niobé parmi les drames d'Euripide, inscrivit en marge la correction ώσπερ Αισχύλος. Un second copiste, ne comprenant pas le sens de cette glose, la prit pour une addition, et, afin d'obtenir un semblant de sens, l'inséra à la suite de Νιόβην en la faisant précéder des mots καϊ μή empruntés à la ligne précédente.
Théodore Reinach.
(1) Je ne rappelle que pour mémoire que Tyrwhitt avait proposé de la compléter en écrivant ώσπερ Ευριπίδης Έκάβην (ή) ώσπερ Aw/ύλος (Αΐ'αντα Αοκρόν)·