HÉROS ET CHASSEURS : LA TENTURE D'ARTÉMIS
de la Fondation Abegg à Riggisberg
En 1972 la Fondation Abegg enrichissait ses collections d'un grand tissu provenant, aux dires du vendeur, d'Ashmounein en Egypte, l'antique Hermou- polis Magna1. Ses dimensions exceptionnelles, plus de 6 m de longueur, sa technique — il s'agit de lin décoré en utilisant le procédé des réserves — et son iconographie en font un document de première importance pour l'art de l'Antiquité tardive2 (fig. 1-2).
La fonction primitive du tissu est sans équivoque : c'est une tenture murale, destinée sans doute aux parois d'une des grandes salles de réception de ces riches maisons dont les fouilles livrent de nombreux exemples tant en Orient qu'en Occident pour l'époque romaine tardive et paléobyzantine3. Un monument permet peut-être, par ses dimensions (1,60x8 m environ), son sujet (des vena- tiones), et sa composition en plusieurs registres de se faire une idée de l'impression que pouvait donner la tenture d'Artémis dans sa disposition primitive : les deux grandes peintures décorant les longs côtés du frigidarium des thermes de la chasse à Lepcis Magna4.
1. Quelques mentions ont déjà été faites du tissu : Abegg Stiftung, Riggisberg. Summarischer Fiihrer durch die Sammlung und die Sonderauslellung, 1975, « Gewerbe aus Aegypten », salle 19 ; F. Baratte, dans MEFRA, 87, 1975, p. 1119-1120; Age of Spirituality, cat. exposition, 1977-1978, New York, p. 435 (L. Kôtzsche) ; Petit guide du visiteur de la Fondation Abegg, Berne, 1982 (2e éd.), p. 27 sq. La préparation de ce travail nous a donné l'occasion de présenter quelques remarques d'iconographie devant la Société nationale des Antiquaires de France : F. Baratte, dans BSNAF, 1982, p. 163-171.
2. Simple dans son principe, la technique consiste à empêcher la teinture d'imprégner le tissu sur certaines surfaces choisies, en les enduisant d'un produit qui les préserve; cf. n. 120.
3. Nous songeons ici tout particulièrement aux maisons en cours de dégagement sur le site d'Apamée de Syrie, qui fournissent la plus riche série de grandes demeures de cette époque fouillée jusqu'ici. J.-Ch. Balty, Guide d'Apamée, Bruxelles, 1981, en particulier, p. 120-137 ; Colloque Apamée de Syrie III (Miscellanea, 13) : aspects de V architecture domestique d'Apamée, Bruxelles, 1984.
4. J. B. Ward Perkins-J. M. C. Toynbee, The Hunting Baths at Lepcis Magna, dans Archaeologia, 93, 1949, p. 181-182, pi. 42-43.