Explication du mot ventaille dans les chansons de geste, par J. Qui- cherat. (Extrait du XXVIIe volume des Mémoires de la société des
Antiquaires de France.)
« Ventaille, visière, espèce de soupape placée devant la bouche et qu'on relevait pour respirer. » Telle est l'explication que donne Raynouard {Lex. Rom. V, 500), du mot ventalha. La même avait déjà été imaginée par Roquefort. D'après la sixième édition du Dictionnaire de l'Académie, ventait (l'Académie ne connaît ce mot qu'au masculin) est un terme de blason qui désigne la « partie inférieure de l'ouverture d'un casque, d'un heaume. » Les précédentes éditions ajoutaient : « qui se joint au nasal quand on la veut fermer, » ce qui compliquait l'erreur. Ces définitions et d'autres qui ont été données ne prouvent rien, sinon que leurs auteurs n'avaient pas l'idée de ce qu'était la ventaille. M. Quicherat, en faisant un emploi judicieux de textes empruntés le plus souvent à nos vieilles chansons de geste, où les diverses pièces de l'armement des chevaliers sont si souvent nommées el décrites, a déterminé exactement l'usage et la disposition de la ventaille. Il remarque qu'elle enveloppait la tête, couvrait les épaules et le haut de la poitrine, recevait le même genre de décoration que le haubert, cette chemise de mailles qui protégeait le corps des anciens chevaliers ; qu'enfin le heaume se plaçait par dessus et y était lacé. Lacer le heaume est une expression on ne peut plus fréquente dans les chansons de geste. C'était donc un véritable capuchon. Mais ce capuchon ne s'est pas toujours appelé ventaille ; d'abord, et notamment daus la chanson de Roland, il est désigné sous le nom de coiffe; la ventaille signifiait alors l'ouverture de la coiffe sur le visage, puis les deux termes primitivement distincts s'employèrent indifféremment et enfin le second prévalut.
Tout est clair et précis dans cette courte dissertation. M. Quicherat a montré par un excellent exemple le secours que les récits épiques du moyen âge, mis en œuvre avec discernement, peuvent apporter à l'éclaircissement de certains points archéologiques. Ce secours est plus grand que celui qu'on pourrait tirer des ouvrages écrits eu latin; ceux-ci, en effet, sont bien obligés d'appliquer aux choses de leur temps des noms antiques, au grand,dé-